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Mwanza
11 octobre 2008

Le train

Question : comment rallier Dar-Es-Salaam, en partance de Kigoma, de manière à la fois ludique, colorée, aventureuse, avec un soupçon de standing tout en nuance... mais surtout polé polé... très... très... polé polé ? Réponse : essayez Tanzara, la bien nommée Tanzania Raylways Authority !

Premier obstacle : la réservation. Pas possible de réserver des billets par téléphone de Mwanza, nous a assuré C comme couillu-mais-pas-quatre-même-si-quatre-z-yeux. Ceci s'avèrera être un mensonge éhonté de ce dernier, qui décidément n'en aura pas foutu une pour nous organiser quelque chose de correct, laissant tout le boulot à C comme séduisante-et-sexy. On a donc des billets jusqu’à Tabora – éloignée d’une bonne douzaine d’heures, tout de même. Ren et La Baronne se diront plus tard que les deux petites allemandes ayant réservé leur compartiment par téléphone jusqu'à Dar étaient l’occasion de drague la plus probante qu'ils auront rencontrée... et laissé filer. C comme quel-connard-ce-C.

La gare de Kigoma est charmante. Nos noms sont inscrits à la craie sur un tableau noir, en regard des compartiments qui nous ont été attribués. On retrouve Béa, femme à la pirogue accueillante, et on lui offre de bon cœur la place de C comme c’est-trop-dur-pour-moi-les-gars-je-viens-pas.

De l'extérieur, rien ne distingue le wagon 1ière classe des autres, tous ont l'air d'avoir subi deux déraillements au moins. Mais en s'approchant, on constate que les wagons 3ième classe sont quand-même plus sombres à l'intérieur. Ou plutôt non, ils sont déjà noirs de monde, nouvel exemple de défi aux lois de la nature - mais si, y a encore de la place, là, on peut encore en empiler deux trois, là.

Le train part à l'heure. Décidément, ils ne font rien comme nous, ces Africains. Grand fracas, nuage d'Apocalypse s'échappant de la chaudière de la locomotive juste devant notre wagon. Dar-Es-Salaam, here we come !

On s'arrête beaucoup, parfois dans une gare, parfois entre deux gares, parfois au milieu de nulle part. A chaque fois, une armée de gosses se jette sur le train, proposant cacahouètes, bouteilles d’eau, sacs plastique, mais laissant les tomates, œufs, bananes et cannes à sucre aux femmes déjà mères. Les hommes ? Ben, les hommes… ils sont dans le train, probablement, on ne sait pas. Chaque fois qu’on repart, des mini-cascadeurs s’accrochent aux wagons, tenant fièrement jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus et lâchent prise dans un petit saut de cabri, nous regardant droit dans les yeux, le torse bombé.

La nuit tombe. Soudain surgit de la pénombre la carcasse d’un convoi ayant déraillée et gisant sur le bas côté. Ambiance. La baronne veut tenter une exploration des autres wagons. Polé. Assanté. Polé. Assanté. Passé les wagons de 2ième classe, il est obligé de rebrousser chemin, devant le mur humain de la 3ième classe. Polé. Assanté. Polé. Assanté.

On nous apporte à manger. Un bon fish bien frit avec du riz bien gras et quelques légumes bien imbibés. Mais on se sent des princes. Qui balancent leur reste par la fenêtre, comme tout le monde, tiens. On paie 10000 TSH pour quatre repas. Au moment de prendre le billet, le préposé articule bien fort et toutes dents dehors : "Thank you for your generous contribution !". On ne sait toujours pas si les princes furent bons princes, sur ce coup-là. Béa distribue les six bananes qu’elle a philanthropiquement achetée à un gosse de pour le même prix que nos quatre repas de 1ière, et passe en revue les photos des innombrables safaris qu’elle a effectués jusque là. Marie reste la dernière.

Vient l’heure du coucher de La Baronne. Ren est déjà installé sur la couchette du haut. Sur une banane abandonnée, un cafard rôde. La baronne se saisit d’une des tongues du couche-tôt, et remet l’animal proprement à sa place, c’est-à-dire en bouillie. Survient un cruel cas de conscience : "Sonny, je ne peux quand-même pas balancer cette banane par la fenêtre par-dessus la tête des Blacks dans le couloir, non ? Je leur donnerais pas, plutôt ? Quand-même…". La tongue fera encore une bonne dizaine de victimes avant que La Baronne soit allongée, et même quelques cadavres plus tard dans la nuit. Comme par un effet de vases communicants, Marie et Geo, dans le compartiment adjacent, auront la désagréable surprise d’allumer la lampe au même instant, et de se retrouver nez-à-nez avec environ deux cents cafards ayant franchi la cloison, effrayés par les coups de savate du sanguinaire aristocrate. Ils éteindront gentiment la lumière, et se reglisseront gentiment dans leur modestes couches - ou serait-ce couche ? - tirant bien haut les draps - ou serait-ce… ?

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Commentaires
B
moi j'aimerais comprendre qui est qui? je passe de longues minutes à vous lire sans savoir qui se cache la derriere.<br /> J'ai juste reconnu marie car ya qu'elle qui est capable de dormir partout alors le train c'est dela bagatelle pour elle:-)))
C
Sans doute - seulement cela devient plus difficile de trouver un pseudo que d'ecrire un message.<br /> Je veux du vrai prenom!!!! Sinon je suis paumee.
M
Parce que l'avion Kigoma-Dar, c'est 259.000 TSH tandis que le train Kigoma-Dar, 54.000 TSH.<br /> <br /> Et parce que le protocole de Kyoto.<br /> <br /> Z'avez vu que Kundera aurait dénoncé un camarade à Prague sous l'ère communiste?<br /> <br /> Y a quelqu'un d'autre que la fine équipe sur ce blog?
R
Le train c'est bien mais l’avion c’est mieux. Mais le train c’est quand même vachement bien…<br /> Pourquoi ?<br /> Parce que les cafards ne sortent que la nuit donc, avec un peu d’abnégation, on s’en sort.<br /> Parce que ce n’est pas dans un avion qu’on reçoit un poisson frit<br /> Parce que de toute façon à un moment tu ne pourras pas aller plus loin et que tu seras quand même forcé de prendre l’avion<br /> Et parce que si le train part à l’heure, l’avion part en avance et tu risques de le louper…
J
Bouddha condamne les attitudes meutrières envers toute espèce animale, écraser un cafard de manière violente quand on a lu la métamorphose, enfin je le suppute avec pareille culture affichée ostensiblement durant tout le séjour, c'est comme insulter une icône religieuse.<br /> <br /> Sinon ben le train c'est bien mais l'avion c'est mieux non ?
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