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Mwanza
19 octobre 2008

Zanzibar

Notre passage-éclair à Dar-Es-Salaam est constitué d'une nuit au Luther House Hostel un peu sordide, d'une tentative de promenade le long de grands boulevards impersonnels et moches, de la traversée de jardins botaniques rachitiques, de l'expérience agressante d'un restaurant - pourtant recommandé par le LP - au service et à la clientèle exécrables, mais également - et c'est ce qu'on en retiendra, finalement - d'un apéro magique au Level 8 Bar, au huitième étage du Kempinski Hotel, où rien que la vue sur la baie accueillant la nuit, à elle seule, a le goût du plus suave des cocktails.

Nous embarquons finalement au petit matin - Geo est réveille depuis cinq heures, mais on a dû tirer La baronne de sa couche - sur le ferry qui nous emmènera à Zanzibar, dernière étape de notre périple. A l'intérieur, Geo et Ren essaient de ne pas regarder le peplum préhistorique sur la vie du Prophète. Sur le pont, La Baronne se plait à imaginer Marie en serveuse du Peplum, quand elle se penche sur la rembarde pour prendre une vague en photo. On sait qu'on va se prélasser sur des plages. On sait qu'on va visiter des barrières de corail. On sait qu'on va faire le Spice Tour, histoire de ne pas revenir idiot. On sait que tout ça va très bien se terminer, en somme.

Premier obstacle esquivé en règle : c'est à pied que nous traversons la foule des rabatteurs du port, sans s'arrêter, jusqu'à la terrasse du Tembo Hotel, où nous faisons le point. Petit sms à Issa, le pote de C&C basé à Stonetown, pour avoir des tuyaux qui nous mèneront en douceur jusqu'à Matemwe, sur la côte est de l'ile. On commande à manger, salades légères pour Marie, Geo et La Baronne, énorme platée de pommes de terre en sauce pour Cloaca.

La Baronne et Geo partent en repérage de babioles à ramener - on achètera tout le dernier jour - pendant que Ren fait connaissance avec Issa et que Marie contemple la scène, la bouche béante - pour ce qui est de la partie visible de son anatomie en tout cas -, un filet de bave aux lèvres. Issa nous a trouvé un minivan tout confort, avec un chauffeur qui répond au nom de Cholo Rastar, version BCBG de Bob Marley, équipé du traditionnel airbag jamaïcain qui se porte sur la tête sous un bonnet chamarré. Il nous faut 45 minutes pour joindre Matemwe et presqu'autant pour trouver une guest house. Des deux adresses du LP - encore lui - la première affiche complète et tant mieux parce qu'elle n'a pas l'air net, et la seconde n'existe carrément plus. Finalement, Cholo nous dépose, avec le concours d'un quidam local qui aura probablement rentabilisé sa journée au passage, chez Sele. On fait la fine bouche parce que c'est un peu plus cher que notre moyenne et que les chambres sentent un peu trop l'air de la mer - que voulez-vous, on s'embourgeoise vite - mais on décide de rester... et on ne le regrettera pas.

La plage est à deux pas, le bar est plus fourni que le bonnet de Cholo, le club de plongée est juste à côté, franchement, de quoi se plaint-on ? Allez, Tusker mbili, Kili moja, Castle moja, tous sur la mezzanine, it's relaxing time ! Une petite douche plus tard et on est assis devant une assiette de thon (catch of the day), une autre de poulpe, une troisième de calamars, et un veggie pour La Baronne, qui a décidé de perdre avant le retour tous les kilos superflus de Geo. C'est délicieux. Repus, ivres de plaisir après cette nouvelle longue et harassante journée de voyage, on se lance dans un jeu des célébrités, le premier sur l'Ile, et la soirée se termine comme toutes les autres, Geo raisonnable, les autres moins, chacun à leur degré de vice apparent.

Le lendemain, Geo et La Baronne vont se renseigner pour la plongée, et décident... de se rabattre sur une partie de snorkling pour le jour d'après. Marie et Ren les accompagneront, alors. Une bonne chose de faite. Reste à agrémenter la journée. La plage n'est pas loin, on n'ira pas plus loin. Les livres sont compulsés, les tubes de crème compressés, les peaux de cul carbonisées. A la tombée de la nuit, on ose une variante, avec un Konyagi tatu pour accompagner l'inamovible Castle moja de Ren. On ne se résigne pas à manger ailleurs, tellement c'était bon la veille. Le lobster et les scampis répondent à toutes les promesses, La Baronne persiste à boycoter les produits de la mer, et tout ça se termine en jeu des célébrités nouvelle formule (interdiction, au deuxième round, de redire un mot déjà cité : résultat, plus personne n'ose dire "acteur", "chanteur", etc., et c'est pas plus mal). Nous avons même une audience inédite, en la présence des invités de Sele accoudés au bar, mzungus bien mis, au teint buriné et aux femmes admirablement bien conservées. Ils rient à gorge déployée des mimes de La Baronne et lancent des noms que nous ne connaissons pas avec leur accent barbare (sud-africain ?). Ca nous déconcentre, mais on se sent un peu star, et on ne leur demande donc pas d'arrêter, surtout que les femmes sont admirablement bien conservées et les gars quand-même pas des gringalets.

Le lendemain, c'est la journée de toutes les activités : il faut essayer les palmes, monter dans le bateau, plonger du bateau, battre des jambes pendant trois bonnes heures, avaler de l'eau de mer, cracher de l'eau de mer, pointer du doigt une bonne centaine de fois le plus beau poisson du monde qu'on est bien sûr le premier à avoir vu, remonter dans le bateau, redescendre du bateau, s'écrouler sur une chaise longue, compulser un bouquin, compresser un tube de crème et choisir ce qu'on va bouffer le soir. C'est comme deux journées en une, en quelque sorte.

Et maintenant cher lecteur, attention, high light ! Oui, on a vu des poissons, oui, ils étaient superbes, oui, il y avait trop d'espèces différentes que pour les compter, mais non... non, quand on nous avait vendus des dauphins la veille, on pensait sérieusement que c'était un attrape-touriste, une bonne histoire drôle. Geo et Ren ont nagé avec eux, Marie était tellement émoustillée qu'elle a sauté à l'eau sans ses palmes - ce qui est moins pratique pour les suivre - et La Baronne, ennemi de toujours de l'exercice physique violent, s'est contenté de remarquer ce que personne n'avait remarqué, ce détail qui met du sel à ses histoires : "Si si, ces deux là étaient en train de baiser, je vous jure !"

Un apéro, un gueuleton de rois, un jeu des célébrités et une nuit moîte plus tard, nous voilà déjà obligés de plier bagage. La décence m'interdit de décrire la tête que La Baronne et Ren avaient après leur jogging sur la plage de la veille, effort physique particulièrement violent s'il en est. En début d'après-midi, on se risque au daladala n° 118 qui nous ramène sur Stonetown. On s'arrête souvent, pour charger des enfants, des vieillards avec ou sans poule, et aussi des vélos. Ca roule vite, Ren adore, tout le monde se remémore le coup de gueule de La Baronne sur la route de Kigoma, l'ambiance est fraternelle, on commence à prendre conscience qu'on va se quitter bientôt.

La Flamingo Guest House sera notre dernière demeure commune - avant celle qui n'était pas prévue, mais c'est une autre histoire. Le hasard attribue comme à chaque fois une énorme chambre à Marie et Geo, et un placard à balai à La Baronne et Ren, mais ces deux-là ne s'en formalisent pas, ils préfèreraient même dormir sur le toît si c'était possible, tiens.

Pour la soirée, après le traditionnel coucher de soleil sur la terrasse de l'Africa House, envahie d'Italiens recuits qui rentrent probablement chez eux le lendemain, on décide de faire confiance à Marie, qui va nous trouver un endroit où on mange bien et où on peut écouter de la musique. Bernique, on se retrouve à manger chez l'habitant un vague mélange de cuisine locale et indienne, La Baronne a les yeux rivés sur le téléviseur, Ren manque tourner de l'oeil, Geo a son traditionnel coup de pompe de fin de soirée - il est 20h15 - et sur le chemin du retour on trouve porte close au Dharma Lounge. Who the fuck ever created the Ramadan? En tout cas, il n'avait pas l'esprit commerçant...

Le lendemain, on s'offre un Spice Tour. Formule privée, excusez du peu. Un minivan avec chauffeur et guide vient nous chercher à l'hotel, nous fait visiter des ruines de palais et de bains... bien en ruines, et constituées principalement d'une bonne douzaine de toilettes à pédale en tout, mais le pire reste à venir : la Spice Farm. Ca commence classique : le guide arrache quelques feuilles à un arbuste, les malaxe et nous les fait sentir. "First guess". Purée, ça ressemble à ça, la canelle ? Etc etc. On remarque à peine le petit gars qui nous suit, une feuille de bananier en main qu'il semble tresser pour confectionner on ne sait quoi. Puis nos craintes se révèlent : il est en train de nous préparer un chapeau ridicule, le même que celui qu'on avait vu sur la tête de ce groupe de gros touristes allemands rougeauds. La honte ! Après le gingembre, la vanille, la citronnelle, le curcuma, le poivre et j'en passe, vient le moment fatidique : la noix de coco. Comble de la gêne. Imaginez-vous la scène : un petit gars - pas le même - grimpe en haut d'un palmier pour faire mine de cueillir ladite noix, tout en nous regardant comme des benêts que nous sommes, avec notre chapeau, notre pendentif et nos lunettes de soleil en feuille de bananier, chantant comme s'il s'esclaffait la chanson qui d'ordinaire signifie pour nous "Courons, v'là un gars qui pense qu'on est des touristes ordinaires et qu'on va lui acheter son bête CD" : "Jambo ! Jambo sana ! Lala lalala lala..." Belle leçon.

Le soir, même si on avait juré qu'on ne le ferait plus, on se retrouve... assis à la terrasse de l'Africa House à contempler la felouk sous le soleil couchant, entourés d'une horde de Britanniques très laids et très blancs qui sont probablement arrivés de chez eux la veille. S'étant fait flouer sur la présence d'un groupe de musique traditionnelle au lounge du Serena Inn, Marie abandonne tout espoir et on se rabat sur le Livingstone où La Baronne demande à la serveuse de faire l'amour avec lui sur la plage - "Sorry, we don't have Sex on the beach". On se dit que si on marche jusqu'au Mercury's Restaurant, du côté du port, on verra plus de locaux. Bernique. Le vin est dégueulasse, le service est approximatif, c'est noir de Blancs... mais on s'amuse quand-même, grâce aux questions indiscrètes qui gènent un peu Marie et les histoires de fesse de Geo. Au retour, on décide de passer par les petites rues et on n'arrive pas à perdre Ren, qui fait pourtant de gros efforts.

Le dernier matin commence comme le précédent par un petit déjeuner sur la terrasse de la guest house. S'en suivent quelques emplettes, principalement des t-shirts. Marie achète aussi une douzaine de nappes bigarrées, Geo un minuscule décapsuleur - l'homme au petit budget est enfin démasqué ! - et La Baronne se met en tête de ramener un buste africain, jusqu'à ce que Marie, lasse d'attendre, lui indique lequel choisir. Ren sera le seul a ramener le maillot de l'inexistante équipe nationale de foot de Zanzibar, article refusé en rue une bonne centaine de fois par chacun de nous en une matinée. Nous clôturons par un sympathique petit restaurant italien en bordure de rivage, avant de filer vers l'aéroport pour un long, très long voyage... mais c'est la même autre histoire.

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Commentaires
R
Si si, y avait des algues, en effet, du côté du "centre ville", la plage et ses environs y étaient même franchement dégueulasses.<br /> <br /> Par contre, du côté du Sele's Guest House plus au sud, désolé mais j'y retourne demain si je peux.<br /> <br /> Ce soir catch of the day ou rien du tout !
P
Pourtant notre enthousiasme était véritablement sincère vis à vis de cette plage.<br /> Et puis toutes les plages sont pareilles, me semble-t-il… Peut-être aurions nous dû les aiguiller vers Pongwe et sa plage privée (bon, y a aussi des algues, faut pas rêver) mais c’est plus cosy.<br /> On montrera les photos de Matemwe à Cyrille ce soir, il tranchera. Il y aura du risotto au champignons des bois, tu veux qu’il te ramène un Tupperware ?
C
Matemwe, version parent Barberousse: pas terrible, decevant et beaucoup d'algues...mmmmh
R
Ok Bob pour le Two tables. Who cares, anyway?<br /> <br /> But sorry Bob pour les dolphins, je l'ai entendu de mes yeux entendu. Non, il ne l'a pas prononcé tel quel, bien sûr - c'est lui l'aristo et bibi le chiffonnier, finalement - mais allusion à copulation il y a clairement eu ("Ils nagaient face à face,..." etc.). "L'appel de la nature, quoi !", selon l'expression qu'il affectionne tant. Et puis forcer un peu le trait, n'est-ce pas justement l'attrait ?<br /> <br /> Mais saluons l'esprit immaculé de Bob - dans quel monde vit-on ? je vous le demande - ainsi que sa touchante sollicitude envers le Divin Marquis. Et en route pour les carnets, yeah ! Quelque chose me dit qu'ils ne seront que mots justes, amour et compassion, tiens, et que Bob sera fier de lui.
B
C'est en effet assez dense, voire touffu; saluons la performance et la générosité de Renaud.<br /> <br /> Cette abondance hélas entraîne quelques petites approximations dont 2 en tous cas méritent rectification:<br /> - ce n'est pas Marie mais la Baronne qui a proposé le restaurant indien Sambusa Two Tables Restaurant où en effet ledit Renaud faisait piètre figure; c'est à se demander s'il a réellement passé un mois en Inde comme il le prétend;<br /> - il ne me revient pas, en aucun cas et à aucun moment, que ladite Baronne ait dit "si si, ces deux là étaient en train de baiser, je vous jure !" lors de l'épisode des dauphins; il est d'ailleurs dommage de ternir ce moment de grâce avec ces propos graveleux.<br /> <br /> Les chanceux lecteurs de ce blog liront ce qu'il advint véritablement lors de cette rencontre avec les gentils dauphins dans les excellents carnets de route de cette bonne Baronne.
Mwanza
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